LE MYSTÈRE DE L'OISEAU BLANC

8 mai 1927, le Bourget, 5h17. Le biplan « l’Oiseau Blanc » piloté par Charles Nungesser et François Coli s’apprête à relever le défi fou de traverser l’Atlantique dans le sens Paris/New-York. Le tout Paris s’est massé pour l’évènement. Au dernier moment, Nungesser jette la radio et vide 200 litres d’essence pour s’alléger. L’appareil décolle. On ne le reverra jamais.

Au sortir de la Grande Guerre, Charles Nungesser est un pilote talentueux mais effronté, multi-décoré et médiatique. Milieu des années 20, la presse se détourne de l’ancien héro de guerre. En quête de gloire, il s’envole alors pour les USA où il jouera son propre rôle dans un film puis s’engagera dans des shows aériens à travers toute l’Amérique. Lassitude, revers de fortune et divorce, Charles a besoin d’un pari fou pour briller à nouveau, ce sera la traversée de l’Atlantique nord. Etre le premier quitte à prendre des risques, faire vite pour passer avant les américains dont les rumeurs disent que la préparation de Lindbergh touche à sa fin.

Accompagné de François Coli, navigateur émérite, Charles convainc le constructeur aéronautique Levasseur de travailler au biplan, un PL8. 8 mai 1927 sur l’aérodrome du Bourget, le temps est exécrable, mais les conditions au dessus de l’Atlantique sont optimales. Les deux pilotes grimpent dans l’appareil, jettent un dernier regard à la foule et s’envolent vers leur destin. 6h45, accompagnés par les avions de la presse, l’Oiseau Blanc survole Etretat, puis laisse derrière lui les côtes françaises. 7h15, il passe au large de Portland, repéré par un sous-marin britannique. 10h50, il est vu au dessus de Kilrush en Irlande par un père et son fils. Et puis, plus rien. Le lendemain, la presse titre pourtant « Nungesser et Coli ont réussi ». Paris est en liesse. Mais vite le démenti arrive, la dépêche disait faux. Dès le lundi 9 mai 1927 des recherches sont entreprises des deux côtés de l’océan.

Les premières investigations se portent sur Terre-Neuve. Le 9 mai 1927 à 9h30 à Saint Mary’s Bay, un témoin dit avoir vu un avion traverser la baie, laissant dernière lui des traces de fumée blanche. L’hypothèse d’un amerrissage sur un étang peu profond mais plein de rochers est émise. Des dizaines d’années après, un bout de métal, dont la peinture correspond à celle de l’Oiseau Blanc a été identifié sans pour autant que l’épave de l’appareil ne soit retrouvée. Les espoirs se tournent alors vers Saint Pierre et Miquelon. Le 9 mai 1927 tôt le matin au port de Saint Pierre, un pêcheur reporte avoir entendu un bourdonnement suivi du choc d’un objet lourd qui tombe dans l’eau. En 2009 et 2010 les recherches triangulaires menées dans la zone du port de Saint-Pierre avec sonar et plongeurs ne donnent cependant rien. Une 3ème hypothèse est alors émise : un atterrissage forcé dans le Maine, aux USA. Le 9 mai 1927 en fin d’après-midi à Round Lake, état du Maine, un pêcheur témoigne avoir entendu un bruit d’avion en difficulté, suivi d’une déflagration dans les collines à l’ouest du lac. Pris pour un fou, son histoire ne ressortira qu’en 1968 dans les lignes du Yankee Magazine. Durant huit ans des bénévoles ratissent la zone, sans succès. Serait-ce alors la forêt du Saguenay au Canada qui aurait eu raison des deux aviateurs ? Mai 1927 à Chicoutimi, un trappeur dit avoir entendu le bruit d’un avion qui semblait descendre. Quelques jours plus tard des pêcheurs aperçoivent des fusées éclairantes. Les pilotes avaient en effet planifié un 2ème itinéraire vers Montréal. L’espoir renaît et des avions parcourent le territoire, larguant des tracts demandant à Nungesser et Coli d’allumer un feu pour signaler leur présence. Le lendemain, durant 5 à 6 minutes, un feu est aperçu. Une expédition est lancée au cœur de la forêt canadienne, sans résultat.

90 ans après, la disparition de l’Oiseau Blanc reste un mystère. Etretat, dernier point de passage sur le sol français rend toujours hommage « à ceux qui ont osé » à travers un monument souvenir et un musée à la gloire des deux aviateurs. Des hommes et la volonté féroce de réussir les paris les plus fous, de laisser leur empreinte. Cette démarche ambitieuse est la philosophie qui anime Omar Abo Dib, directeur du Donjon.

L’établissement est un patrimoine vivant, agrémenté au fil des années de la patte d’artistes contemporains, à l’image de l’immense fresque murale réalisée dernièrement par Jean-Charles de Castelbajac. Résidence d’artistes, le Donjon vibre de cette envie furieuse de marquer son temps, comme à leur époque Charles Nungesser et François Coli.

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